TOUR DES GLACIERS DE LA VANOISE (TGV) DIMANCHE 3 JUILLET 2022 Départ 4h |
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Distance : 73km | Dénivelé : 3500m D+ Mon parcours GPS avec Photos by Relive
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15h47'25'' 354eme / 404 arrivées (684 partants) Le parcours |
- Détails
- Catégorie : Ultra-Trails
- Clics : 1819
475eme/ 869 partants en 19h04'31'' (612 arrivées) (+6km de parcours de repli cause météo) |
MAXI-RACE du Lac d'Annecy ; 5ème participation Samedi 30 Octobre 2021 à 00h30 10ème édition du Trail International du Lac d'Annecy. 88km - 5200m Dénivelé positif |
- Détails
- Catégorie : Ultra-Trails
- Clics : 2911
Lire la suite : 2021 Annecy MAXI-RACE (85Km 5200D+ ) - annonce
6ème Trail des Aiguilles Rouges à Chamonix dimanche 26 Septembre (départ 4h30 à Chamonix) 54km , 3600D+ sur les arrêtes des aiguilles rouges / 15eme Anniversaire de l'épreuve. 10h13' 366eme 589 partants (14eme M4H) Relive 3d Départ Chamonix ,Refuge Caillet , Lavancher, Argentière, Tour, aiguille des Posettes, Vallorcine, Chalet de Loriaz, vallée de Berard, Col des Montets, La Flègère, FLoria (parcours de Repli) Suivi Christian / Suivi Agnès / Suivi Patrick / Suivi Etienne |
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- Catégorie : Ultra-Trails
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Lire la suite : 2021 TAR Chamonix Trail des Aiguilles Rouges (55km 4000D+) - annonce
TOUR DES GLACIERS DE LA VANOISE (TGV) DIMANCHE 4 JUILLET 2021 Départ 3h |
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premier trail de 2021... version repli cause météo
Distance : 53km | Dénivelé : 3500m D+ |
306eme/398 arrivées (460 partants) en 10h35'15'' (avec assistance médicale et évacuation hélico pendant 30mn) Le parcours |
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- Catégorie : Ultra-Trails
- Clics : 2972
La Diagonale des Fous en 52h !Un enfer de plaisir ? Un rêve intense ?
Je vous invite à découvrir ce récit découpé en 4 parties.
C’est Quoi ? Comment faire ? L’aventure et Pourquoi ! |
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Le grand RAID : La Diagonale des Fous
La Diagonale des Fous est le principal ultra-trail organisé par l’association Grand Raid sur l’île de La Réunion, département d’outre-mer français de l’océan Indien. Cette course est organisée au mois d’octobre et est réputée pour être l’une des plus difficiles au monde dans son genre.
Son départ est donné dans le sud de l’île, à Saint-Pierre. Les concurrents commencent la course par une ascension jusqu’au belvédère du Nez de Bœuf à l’ouest du massif du Piton de La Fournaise. Ils poursuivent ensuite leurs efforts dans les cirques, pitons et remparts classés au patrimoine mondial de l’UNESCO en empruntant ainsi le territoire du Parc National de La Réunion.
C’est surtout un événement majeur de l’île, appartenant à son patrimoine sportif et culturel. Les cirques de Cilaos, Mafate et Salazie offrent des paysages et une biodiversité uniques. Après 22h de course pour les premiers, l’arrivée est jugée au Nord de l’île au stade de La Redoute à Saint-Denis.
Une distance de 165 km avec un dénivelé positif d’environ 10000 mètres et autant en négatif la qualifie de Diagonale des Fous !
Contexte et Inscription
La diagonale des fous est un Ultra que je voulais réaliser de puis longtemps. J’avais été finisher 2 fois sur l'UTMB (2014 et 2017) et il me manquait cette course mythique que tout le monde connait dans le milieu des trailers. D’autres ultras sont très beaux et techniques comme l’UTAT (au Maroc) ou dans le Beaufortin.
Je ne pouvais pas partir seul à l'autre bout du monde pour cette aventure qui se déroule en dehors des vacances scolaires. Mais ma fille Gaëlle, son mari Thomas et mon petit-fils habitant à SAINT-LEU depuis Octobre 2022, m’ont offert l’occasion unique et l’alibi dont j’avais besoin pour m’inscrire.
Deux façons de s’inscrire : soit par tirage au sort, soit en jouant la sécurité en souscrivant un « package Hôtel-avion-dossard », ce que j’ai fait, en Janvier 2023 afin d’assurer mes arrières. Même comme ça, il a été laborieux de se connecter au site, celui-ci étant pris d’assaut dès la minute où il a été mis en ligne ! Mais avec de la persévérance et un peu de ruse, j’ai enfin tiré le SAINT GRAAL !
Un fois le dossier validé, il me fallait un entrainement à la hauteur du challenge, d’autant qu’étant maintenant dans la catégorie M4H (les vieux quoi !) je me doutais que mon niveau physique n’était pas le même que lors de l’UTMB en 2014.
Entrainements, courses et Trails pour progresser.
- Semi-marathon de Paris (21,1km)
- 5 mars en 1h37’18’’
- Marathon de Paris (42,195m)
- 2 Avril en 3h30’04’’
- Trail du Patois (Olhain 62) 29Km 661D+
- 3h02'30'' 86eme/ 257 arrivées / 6eme M4M
- Maxirace (Annecy 74) 88km 5200D+
- Samedi 26 Mai en 19h46'' , 1268eme / 1442 des partants
- J’ai eu beaucoup de mal et un manque de motivation sur un parcours déjà fait 5 fois.
- Trail du Mont-St-Eloi 24km / 333D+
- Dimanche 18 Juin à 09h00 / 2h07'33'' 76eme/262 arrivées / 4emeM4M
- Vélo tourisme entre Pointe du Raz et Vannes
- Du 8 Juillet au 15 Juillet : 550 Km avec Anne
- Queyras : Entrainements et randonnées
- Du 5 au 13 Aout : 301km 19000D+
- Des sorties à 6h du matin pour revenir vers 9h30 et entamer des randonnées avec ma femme.
- Thonon-les-Bains à Chamonix : Trail en solo
- Du 20 au 23 Aout : 150 km 10000D+
- GR5 avec variante Refuge dent d’Oche et le Buet par le refuge de Grenairon
- Trail des aiguilles rouges 53km 4000D+
- Dimanche 24 Septembre : / 11h12'03'' 475eme/753
- Sorties sur les terrils de Lens, St-Eloi, Mont Lorette : Entrainements Pas de Calais (Arras)
- 10 à 20 fois les montées, en restant motivé, en pleine chaleur, pour réaliser 700D+ à 1000D+ à chaque sortie.
Soit environ 2000Km et 54000D+ depuis début Janvier.
Les 3 semaines précédant LA COURSE, c’est repos : petites sorties pour rester en forme puis plus rien les 10 jours avant : pas l’habitude de rien foutre !
Arrivée sur l'Ile de la Réunion le 15/10/2023 8h30
Je sais pourquoi je suis là (outre le fait d’être en vacances avec ma famille, bien sûr !) et l’attente jusqu’au Jeudi est stressante. Le 19 Octobre est dans ma tête depuis presque un an. Un compteur sur le site égrène les jours qui me séparent du départ. Notre groupe Famille sur Signal a été nommé « Dix‘agionale des fous » ; je ne peux donc pas oublier que c’est la cible en octobre. Je n’ai jamais été aussi prêt. Drôle de sensation, de stress, de plaisir d’y être et de vouloir partir vite dans l’aventure... Une montagne d’évènements, de chemins inconnus, de sensations. Je me rassure en me disant que ce n’est qu’une traversée à pied un peu rapide.
Mon ami Fabrice, avec qui j’avais fait mon premier ultra en 2012 (la CCC) avait fait la Diag en 2013. Il m’a bien briefé quelques jours avant le départ, en m’expliquant les difficultés de certains lieux. Je m’étais imaginé les chemins et les difficultés. Elles étaient bien là mais différentes de ce que j’avais imaginé, quoique toutes aussi magnifiques avec un effort pas forcement aux mêmes endroits décrits.
Je fais en sorte d’être décontracté et zen durant ces quelques jours précédant le grand départ : plage avec la famille, visite d’une exploitation de thé au-dessus de Saint-Pierre, sortie en bateau. Mais mon regard est sans arrêt attiré par les montagnes, je devine la première muraille au loin au niveau de notre Dame de la Paix. Robin me donne un bâton de 4 cm, que je grave avec mon couteau Suisse ; objet fétiche, il fera la Diag avec moi.
Visite de Saint-Pierre et repérage de l’avenue du départ et son ancienne gare.
Mercredi 18/10 : Retrait des dossards
Mercredi 11h : Saint-Pierre est bloqué par les voitures, je me gare sur la voie de sortie de la sortie « Ravine Blanche ». Je vais enfin tâter du sportif, humer l’odeur de l’effort à venir, discuter avec mes prochains compagnons de route. Je vais chercher LE dossard tant attendu.
La remise des dossards est un long labyrinthe au soleil. On se retrouve entre coureurs, on se regarde, on se jauge dans une ambiance bon enfant. Je fais la connaissance de Charly (dossard 291) un traileur du pays de Diois et Fabien (dossard 222) qui est réunionnais. Au moins ils ont la montagne chez eux pour s’entrainer ! Outre le dossard (c’est bon, je l’ai enfin !!!) on nous donne deux tee-shirts Diag, jaunes, important le jaune car chaque course a sa couleur. La règle du trail nous dit qu’on doit les porter au départ et à l’arrivée (clin d’œil pour les sponsors...). |
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Thomas a souscrit une balise GPS SFR qui permettra de me suivre en temps réel, je la récupère au passage : brave gendre qui ne veut pas perdre son beau-père !
Après ce premier bain dans l’ambiance de la Diag, l’après-midi est dédié à la préparation du SAC ! Qu’on ne me dérange pas ! Pas trop de chose pour que ça ne soit pas trop lourd, mais l’indispensable et surtout le matériel obligatoire, c’est que ça ne rigole pas avec la sécurité ! Pour l’occasion, j’ai investi dans un nouveau sac principal Salomon (nous aurons quasiment tous le même !) après 12 ans de bons et loyaux services du précédent. Le contenu du sac est plus simple à faire : pas de pantalon étanche, de fourrure polaire, de gants, de protection grand froid ! L’avantage d’être à la Réunion ! Il plus léger et bien positionné en haut du dos : le pied ! Tout est optimisé pour trouver facilement la nourriture, l’eau et l’iPhone pour prendre les photos.
Il faut penser aussi à faire les sacs de délestage qui m’attendront à Cilaos et Deux bras, avec des habits de rechanges, batteries, nourriture etc...
Le premier sac pour « Cilaos » contient une paire de chaussure de trail neuve, 1 paire de chaussette, un haut technique manche courte, des compotes, des barres céréales, des pastilles isotoniques Isostar, une lampe frontale de rechange, du talque et de la crème Flextor.
J’ai programmé en France la lampe Neo Petzl pour avoir 3 modes de durée de la batterie (12h30, 8h30 et 6h30) ; en effet, en fonction du mode, la luminosité est plus ou moins intense, ce qui fait économiser la batterie, non pas que je sois radin mais il va falloir gérer des nuits de 12h et pas de 6h comme à l’UTMB. Le soleil se couche à 18 h là-bas en Octobre pour se lever à 6h !
J’ai acquis une montre Garmin Enduro 2. Elle peut tenir 60h et se recharge au soleil. Il est indispensable que je puisse suivre mon avancée en km et D+.
Le second sac pour « Deux bras » contient une autre paire de chaussette, des compotes, des twixs, des gâteaux savanes (j’adore !), la crème anti-frottement, des pastilles Isostar en cas de coup de mou, le fameux débardeur Diag jaune.
Je ne fais pas de sac pour Saint-Denis « La redoute » car ma famille devrait m’y attendre, AMEN !
Thomas émet le souhait de m’accompagner en courant le samedi après-midi de Cilaos vers le col Taïbit, Marla puis remontée par le col des Bœufs. Une longue portion de 30 km, très sauvage. Il va falloir que je respecte mes horaires pour ne pas le faire trop attendre ! Ça va me booster !
Jeudi 19/10 : Jour J
Jeudi matin à 8h30, petite sortie en bateau pour voir les baleines et les dauphins de Saint-Gilles. C’est magnifique et ça me permet d’échapper à la pression qui monte. Le déjeuner au restaurant « Le Sauvage » est difficile. Je suis bloqué, je n’ai même pas pris de glace en dessert et ça c’est un très bon signe de stress chez moi !!!
Mon ami Christophe, resté à Londres, m’encourage à ne pas abandonner et à finir. C’est ce que je compte faire, dis donc !
Il faut douter un peu mais pas trop, être à 200% motivé pour faire cette course de fou. Ma sœur m’appelle aussi et me souhaite bon départ, elle sera dans l’avion pour Montréal à l’heure du départ. Alix, ma fille s’inquiète de ma motivation. C’est là que je lui sors ma phrase qui tue : « L’échec n’est pas une option ! » On remonte enfin à Saint-Leu lieu-dit « colimaçon » chez ma fille Gaëlle et je m’oblige à faire une sieste de 45 mn.
On décide de partir sur Saint-Pierre vers 17h pour un départ à 21h ; nous craignons les embouteillages (qu’il n’y aura pas) nous avons donc tout le temps de pic niquer, nous reposer, jouer avec Robin au jardin public. Trois heures d’une interminable attente.
A la radio, le président de l’office de tourisme vente les retombées : 12 millions d’euros lors des courses pendant ces 4 jours. Tu m’étonnes que ce soit l’évènement de l’année ! Il annonce qu’il l’a fait 3 fois dont la première il y a 31 ans et signale qu’il perd à chaque fois 7 à 8 Kg.
Un coup d’œil à la météo, car si les journées sont chaudes, les nuits peuvent être glaciales et friser le zéro degré. Heureusement, le temps s’annonce clément : pas de gel, 8 à 10 degrés la nuit avec bien sûr une atmosphère très humide et chaude la journée. Thomas ferme la radio de peur que j’angoisse.
Nous avons rejoint la zone de départ et nous attendons, assis sur un bord de trottoir devant un 4/4 de police. Robin a une baguette lumineuse. Il est tout excité et tente de transformer tout le monde en traileur... Facile : il n’y a que des traileurs !
Vers 20h30, je décide de rentrer dans le sas des départs et de déposer les sacs de délestages. Toute entrée est définitive. Anne me dit au revoir jusqu’au dernier moment. Une grosse aventure commence, elle le sait et connait les suivis d’Ultras, mais celui-ci est compliqué. Anne va alimenter le groupe Signal de la belle-famille/famille/amis tout au long de la course. Je reste en général très humble avant une épreuve et je ne communique pas trop par superstition ou crainte d’avoir trop de pression. Et puis on ne sait jamais : je pourrais ne pas arriver et là tu as l’air con si tu t’es trop venté avant !
La Diagonale, Heure par heure pendant 4 jours
DEPART 21h30 SAS 4: Jeudi 19 Octobre
Je dépose mes 2 sacs de délestages pour Cilaos et Deux bras ; ils sont enregistrés et je suis aussi topé comme partant. Il y a 4 départs donc 4 grands espaces encadrés par des barrières. Ceux qui connaissent sont venus avec des cartons et les ont installés sur les graviers pour se reposer (bon à savoir pour la prochaine fois…)
Je rejoins Charly au fond de l’enclos sur l’herbe. Puis nous avançons doucement au fur et à mesure que les sas s’ouvrent.
Un gros groupe de bénévole se fait photographier devant notre sas, ils nous empêchent de nous approcher de l’arche de départ, ça m’énerve !
A chaque ouverture des sas précédents, chacun essaye de se placer au mieux devant les autres. Je ne sais pas pourquoi, probablement un réflexe de course, car on ne va pas être en mode marathon !
Je fais les dernières photos en espérant les regarder avec fierté si je réussis à traverser cette île.
Première étape : je passe en mode avion mon iPhone pour rester concentré et ménager les batteries. Je suis maintenant seul, entouré de 2000 personnes : gros paradoxe.
Puis c’est à notre tour, le sas s’ouvre : moment magique, je m’élance, euphorique et le stress d’un coup disparait...
A 400 m du départ, je repère Gaëlle, Thomas, Robin et Anne placés à gauche, avec leurs cloches, maracas et bonnets de lutins. C’est très rapide mais je suis content de les avoir aperçus et ils ont crié « aller Papou ! aller Christian !»
Que de spectateurs pendant au moins 5 km ! Une ambiance indescriptible ! Ça prend aux tripes, ça booste, des mains tendues pour toucher les « athlètes ». Nous avons un dossard et nous faisons rêver les spectateurs, bonheur !
Rapidement nous quittons le bord de mer de Saint-Pierre pour remonter vers l’intérieur. C’est le moment d’allumer nos frontales. Nous empruntons un chemin bordé de cannes à sucre. Tout devient plus calme : moins de monde donc de cris, de bravos, de mains. Le timing est pour l’instant ma priorité dans la nuit : Je veux respecter mes passages horaires pour me rassurer.
Déjà un concurrent qui se tient la cheville. Il va surement abandonner. Tout peut arriver, il faut se préserver et faire attention à tous les pièges des chemins. Pour l’instant c’est simple. Mais je sais que ça ne va pas durer...
Domaine VIDOT : Jeudi 19 Octobre : 23h23 : 15km 678D+
J’ai 10 mn d’avance sur mes prévisions, Youpi, un bon début. Je passe rapidement le ravito. Il fait encore très chaud et pas trop besoin de remplir mes gourdes. Un coca rapide (quand même quoi !) et je continue. La machine est lancée !!!
Dans le chemin, un coureur est assis et gémit. Il vient de faire une chute, il a l’épaule luxée. Pour l’encourager, un autre coureur, en passant près de lui, lui tape sur l’épaule : bon courage mon gars ! Il n’avait pas compris son problème ! Heureusement il a tapé sur l’autre épaule !
Au 19 km, bouchon de circulation ! Je pensais que les départs par sas allaient éviter ce genre de problème mais non ! C’est énervant de devoir s’arrêter complètement si prêt du départ mais tout le monde garde patience et personne ne cherche à doubler (sinon je le tue !). J’en profite pour rallumer mon iPhone et prendre connaissance de tous les messages : même si prêt du départ, ça fait chaud au cœur !
Ce bouchon nous aura fait perdre 1h30 de chrono pour la vague 4 et bien plus encore pour celle d’après (dixit un coureur de la vague 5 avec qui j’échangerai plus tard).
Dans le bouchon, j’aide mon voisin réunionnais à s’habiller pour la nuit. Il met 3 couches dont le tee-shirt officiel (obligé dit-il c’est superstitieux), il ne se rend pas compte qu’il fait encore 20 degrés ou quoi ?! J’enfile quand même ma petite fourrure polaire X-alpine Verbier de 2019 finisheur (très pratique et légère). Les réunionnais sont en fait très frileux ; quand je lui raconte qu’il y a 3 semaines j’étais sur le trail des aiguilles rouges sous le vent et la neige, à 8h du matin et 2500 m, il me regarde avec des grands yeux.
Derrière moi, je repère le dossard 222, j’avais fait la queue avec lui hier, amusant. Je l’ai repéré car il a une drôle de voix très reconnaissable.
Quand on me demande d’où je viens, je suis fier de nommer ma ville Arras ; malheureusement les gens maintenant savent où la situer, suite aux évènements dramatiques du 13 octobre au lycée Gambetta.
Notre Dame de la PAIX : Vendredi 20 Octobre 3h15 : 28km 1830D+
Le chemin n’est pas trop difficile, ou alors je ne me souviens pas des pièges. J’essaye de manger et de me désaltérer. Je passe vite ce ravito, je n’ai pas trop de souvenirs. Tout ce que je constate c’est que j’aurai dû passer à 2h00 du matin et que j’ai 1h15 de retard sur mes prévisions. Zut !
Parking Aire NEZ de BOEUF : Vendredi 20 Octobre 5h27 : 40,8km 2544D+
Il est 5h27, le jour commence à se lever, il faut que je mange du solide. Je n’ai que 30 mn de retard sur mes prévisions, j’ai rattrapé mon retard malgré le bouchon de 1h30.
Je mange une soupe avec vermicelle, très chaude, ça fait du bien ; par contre sans cuillère et servi dans un gobelet tout mou, c’est folklorique. Trois femmes réunionnaises dansent pour nous. Quelle gentillesse de nous booster et nous réveiller au petit matin après notre première nuit blanche.
Sur la plaine de Cafres, je double des coureurs de la vague 2 et 3, et toc ! Je me dis que je suis plus en forme que prévu, ça me rassure un peu.
En chemin, je discute avec une jeune traileuse de 35 ans, elle est hôtesse sur Air Austral, au moins elle n’aura pas trop de difficulté à bien gérer les nuits blanches, quelle veinarde, faut que je pense à me recycler... Elle a déjà fait le trail de Bourbon de 110 km mais elle voulait réaliser la Diag. Je ne sais pas si elle a réussi à terminer. Elle est partie devant avec un autre coureur en discutant de banalités de traileurs...
Un traileur consulte ses messages, petit trait d’humour (je suis encore en état d’en faire) : je l’interpelle en lui disant « ça sera 4 points en moins sur son permis traileur ». Il me redoublera plus tard en me disant qu’il peut les récupérer maintenant !
La traversée de la plaine des Cafres est magnifique, au bout se dessine le piton des neiges. Au loin les cirques de Mafate et le pic Kerveguen. Un nom breton sur une île du pacifique ? Étrange !
Ma cible est encore loin, j’avance et me projette sur Cilaos où je vais retrouver Anne, Gaëlle, Thomas et Robin. Le chemin est bordé de fils barbelés, faut faire attention. Il faut parfois les frôler. D’ailleurs je me suis accroché le tee-shirt en perdant l’équilibre. Heureusement, je n’ai pas mis les mains !
Nous retrouvons une route et au loin le Ravito de Mare à boue. Moi qui avais mis mes guêtres, je n’ai pas eu de terrains très hostiles depuis le départ. D’ailleurs, je pense que j’étais le seul en guêtre.
Tout le long de la route, je vois des mini ravitos personnels : les familles sont là avec le Rougail-saucisses, parfois la caravane, le Van aménagé, pour une pause repas ou sieste de leur poulain. Ils remballent le tout quand leur coureur est passé, pour aller l’attendre à nouveau quelques dizaines de km plus loin
Je commence à me rendre compte pourquoi la Diag est une institution pour les réunionnais. D’ailleurs mon pote réunionnais de cette nuit me raconte qu’il en était à sa 10eme course ! Il est devenu addict de l’ambiance et des retrouvailles de sa famille le long du parcours. Il nous a fait rêver en nous racontant l’arrivée à la Redoute. J’ai hâte !
MARE A BOUE : Vendredi 20 Octobre 07h19 : 51,2km 2594D+
Le jour s’est levé, il est 7h19, je range ma frontale. Au ravito, je mange une soupe, fais le plein d’eau, prends quelques pastilles Isostar. Je sais que la journée va être une longue, très longue découverte ; avec le recul, heureusement que je ne savais rien du parcours...
Il ne fait pas froid... autour de 15 degrés. Je sors du Ravito et me dirige vers la plus importante montée du parcours. Au loin, j’entends tourner les hélicoptères touristiques qui commencent leurs rotations. Drôles de bruits qui résonnent dans le cirque de Cilaos.
Le chemin est étroit et technique. Un traileur nous explique que nous allons longer toute la crête et descendre quand nous arriverons à un refuge. Ça parait simple. Mais en fait c’est super technique !!! Je n’ai jamais vu un chemin aussi dur et vertigineux à certains endroits ! Je pense à mon ami Christophe de Londres : il n’aimerait absolument pas ce genre de chemins.
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L’écusson des Flandres (écusson de gendarmerie) sur mon sac intrigue mais suscite l’amitié des traileur ayant fait leurs études à Lille. Parfois je suis assimilé à un gendarme. J’ai aussi un écusson « Abeille », non pas que j’ai fait le trail des abeilles à la réunion mais je suis apiculteur amateur et fais du miel. (l’Ultra-miel d’Achicourt…)
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Le chemin en pleine chaleur est interminable, on se demande tous quand on va en sortir. Chaque crète semble être la dernière !
CROISEE KERVEGUEN : Vendredi 20 Octobre 11h19 : 63,3km 3596D+
En 3h, on a fait 12km et 1000D+, des vraies tortues ! Le ravito minimaliste nous propose un peu d’eau en nous expliquant qu’on est encore nombreux à passer et qu’il faut économiser. Je pensais que ce ravito était le départ pour la descente vers Cilaos mais pas du tout ! Il nous reste encore le col à atteindre ! On n’est pas au bout de nos peines !
Au col, une femme de l’organisation, secouriste « SARA Event » (aide d’urgence) est là. Je refais une petite blague : je lui dis que je n’appuierai pas tout de suite sur le bouton d’alerte de l’appli. Elle m’encourage comme tous les bénévoles qui sont tous très sympas. Pour comprendre ma blague : nous avions obligation de télécharger avant la course une application de secours, avec un gros bouton rouge à actionner en cas de gros problème. |
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La descente vers Cilaos est longue (1100 m de D-), elle n’en finit pas, il me tarde de retrouver mon comité d’accueil ; les connaissant, ils doivent être déguisés et surement très bruyants !
LE BLOC : Vendredi 20 Octobre 13h06 : 67,9km 3637D+
Enfin le lieu-dit Le Bloc. Moi qui croyais que c’était encore une montée d’enfer, c’est en fait une descente très technique. Pointage obligatoire avant la base-vie de Cilaos, grand ravito.
PLATEAU DES CHENES : Vendredi 20 Octobre 13h38 : 70km 3754D+
Encore un pointage sauvage. Cilaos n’est plus qu’à 2km.…mais le comité d’accueil est là, je ne les vois pas encore mais je les sens, je crois les entendre, déjà des hallucinations ?
Puis, je les vois enfin : Robin se précipite vers moi et m’aide à descendre en me tenant la main, il a mis son tee-shirt de supporter, floqué par le roi du tee-shirt de la Réunion, PARDON ; Anne a enfin son traileur de mari à montrer.
Depuis 3 h, ils encourageaient tous les concurrents qui passaient, à coup de cloche, maracas, trombone et hurlements.
Ce fut un moment inoubliable de descendre avec ma femme et mon petit-fils mains dans la main sur ce chemin.
Robin court devant moi sur la route et ne veut plus s’arrêter. Direction le stade de Cilaos maintenant.
CILAOS : Vendredi 20 Octobre 14h04 : 72,5km 3769D+
Enfin le gros ravito de Cilaos, je vais pouvoir faire une grande pause : 50 mn pendant lesquelles je me change grâce au sac de délestage.
Dommage que je ne puisse échanger avec ma famille ; il n’y a pas de zone en commun entre les coureurs et les accompagnants. Il est possible de le faire à l’extérieur du stade. Je traverse rapidement les stands de massage et me dirige vers la pelouse du stade. Je récupère mon sac de délestage.
Ça va vous faire rire mais je prends grand soin de mes pieds, qui doivent encore me porter sur 100 km : je les nettoie, les sèche, les frictionne et leur offre une belle paire de chaussettes toutes propres avec mes nouvelles chaussures Asic jamais étrennées ! Ah mais non, en fait je préfère garder mes vieilles chaussures, j’ai confiance en elles, elles peuvent le faire ! Je remballe mes chaussures toutes neuves dans le sac : on ne change pas une équipe qui gagne !
J’aspire un tube Energique Marathon avec du sucre ... drôle de gout... zut il est périmé ! J’espère qu’il ne va pas me filer la drôle ! Allez zou, je balance à la poubelle les autres tubes !
Mon amie Agnès (traileuse aguerrie) m’avait conseillé de me doucher (ce n’est pas une fille pour rien !). Je fais l’impasse sur la douche, trop hâte de manger, boire, et voir ma famille. Je prends une soupe et plusieurs Yops. Quel délice ! Ça me redonne de la pêche. J’en garde un dans mon sac pour la montée au col Taïbit.
Je retrouve enfin Gaëlle, Anne, Thomas et Robin à la sortie, prêt à en découdre. Après avoir amadoué la bénévole qui surveille la sortie, Robin arrive à se glisser dans le ravito, il en profite pour piocher à manger, il me tend une banane... Beurk ! Il ne me connait pas encore très bien !
Thomas s’absente pour aller chercher des bouteilles de « Ladi lafé » , vin sucré de Cilaos qu’il me promet si je finis, tu ne sais pas à qui tu parles Thomas !
Je fais doucement un bout de route avec Robin, Anne et Gaëlle. Entre concurrents, on échange sur le fait que c’est un beau chemin sans pierre, sans racine ; agréable mais ça ne va pas durer...
Je croise une dernière fois mes groupies puis je pars vers l’inconnu et une deuxième nuit. Je leur dis « A demain à Possession ! »
Pour parvenir au col, le chemin nous fait descendre...mmmmmh étonnant ! Mais cela nous permet de passer devant deux belles cascades : ça vaut le détour !
Je croise une fille qui vient de se blesser à la main, elle saigne la rage la pauvre ! Elle remonte vers Cilaos pour se faire soigner. Ça a l’air grave ! elle ne pourra continuer que si elle a un pansement étanche, elle aura surement des points de sutures. Je ne sais pas si elle a terminé la Diag. L’avait qu’à pas être devant moi !
SENTIER TAIBIT : Vendredi 20 Octobre 17h01 : 79,3km 4336D+
Sans m’en rendre compte, je grimpe à partir de Cilaos un petit 500D+ soit 7 km, ça remet en jambes !
Le ravito est sur la route bitumée, ce n’est pas malin car il faut faire attention à la circulation, aux voitures et motos qui passent. La camionnette d’eau se gare au plus près des tentes du ravito. Il faut absolument que je fasse le plein pour le col Taibit et l’arrivée à Marla, car après ce ravito, c’est la dèche, plus rien à bequeter ni boire.
Je m’assoie un instant sur le parapet pour reprendre des forces. Il est 17h, je prépare ma frontale, bien décidé à avancer un maximum pendant cette deuxième nuit.
Bien-sûr, j’ai les jambes lourdes mais le corps commande et finalement petits pas après petits pas (dixit les Réunionnais), on ne pense plus à son état physique.
Il est 17h30 et je suis en avance de 6h30 par rapport à la barrière horaire Sas 4 : ouf !
Je découvre alors un lieu connu de tous les « diagueurs » : un père Noel déguisé en chevalier (vous voyez ? moi pas bien !) nous attend. On me propose une tisane aux plantes locales dite « ascenseur », elle nous ferait monter plus vite...bof, j’en reste à mon beau verre d’eau plate, trop peur des effets secondaires ou d’aller trop vite !
J’atteins le fameux col Taibit après 6km et 800D+. Certains traileurs, trop fatigués, prennent la décision de redescendre pour abandonner, en effet, si on rentre dans Mafate, on n’en ressort que 24h plus tard donc il faut être sûr de son coup. Aucune échappatoire possible ; si tu rentres, tu sors et tu vas sur Possession. Dans le cas contraire, tu te débrouilles seul pour revenir à la civilisation.
Après le col Taibit, c’est 2 km pour arriver sur Marla de nuit donc avec la frontale. Au final je trouve ça rapide, ou alors je ne me rends plus vraiment compte des efforts fournis. Je suis comme un robot-marcheur. Le mental a pris le pouvoir sur les muscles. C’est là que je me rends compte qu’on avance au mental au bout d’un moment.
La descente est éprouvante et me parait par contre très longue. Les jambes chauffent plus en descente. Je m’arrête plusieurs fois pour récupérer.
MARLA : Vendredi 20 Octobre 22h06 : 85,5km 5174D+
A Marla, seconde nuit, il faut que je mange et boive ; même si mon corps me dit l’inverse. Je trouve un endroit pour m’assoir. Gros coup de fatigue où le corps prend le dessus sur le mental : je me mets à trembler de partout comme une feuille, je n’arrive même pas à répondre aux SMS. Manger-boire-boire-manger, me restaurer. Il est hors de question de rester là. A la limite je préfère repartir vite, d’abord parce que l’immobilité me glace, ensuite quand j’avance, je ne réfléchis plus à la fatigue, que je sens moins.
Je regarde le chrono et mes temps de passages qui sont déjà obsolètes. Je décide d’enlever le bracelet qui m’indique mes heures de passages prévus, comme cela je serai moins démoralisé puisque toutes mes prévisions sont fausses. Snif !
Il faut partir vite pour ne pas succomber à la facilité de vouloir dormir. C’est un piège de vouloir faire une pause trop longue. On passe devant un petit refuge où des randonneurs très festifs, voire un peu bourrés, nous encouragent. Je passe non sans mal un cours d’eau en me trompant de direction ; heureusement qu’il y avait des traileurs qui avaient vu la traversée. Je continuais dans le lit de la rivière par erreur. Je n’ai plus les idées très claires.
On doit aller à « Plaine des merles » et puis « col de bœufs ». Ça monte, ça descend, j’ai l’impression de tourner en rond ! J’ai perdu totalement le sens de l’orientation, je marche et j’avance, c’est tout ! Je ne comprends pas vraiment ou l’on va et comment ça tourne. Finalement je passe le col des bœufs sans que je comprenne vraiment comment j’y suis arrivé.
On est au km 85 et maintenant, je ne compte plus, je décompte les km, est-ce bon signe ?
J’essaie de faire le plus de kilomètres pendant la nuit pour que ma famille à son réveil ait la bonne surprise de voir comme j’ai bien avancé pendant la nuit, que je suis sorti de Mafate. Je pense à leur lit douillet et ça me met des étoiles dans les yeux. Je me dis que Roche plate et dos d’Ane seront une formalité comme les 2 dernières bosses de l’UTMB. Une fois de plus, ça va en être tout autrement ! On n’est que vendredi soir...(sans compter Colorado et la descente sur Saint-Denis)
PLAINE DES MERLES : Vendredi 20 Octobre 22h37 : 92,9km 5698D+
A la Plaine des Merles à 22h37, le Ravito est sur le bord du chemin. Toutes les chaises sont prises ! Zut ! Chacun essaye de retrouver du réconfort en consultant ses messages, s’évader et penser fort à ceux qui partagent notre aventure. A ce stade, on n’avance que grâce aux influx positifs de nos suiveurs.
J’essaye de prendre un repas chaud, mais seule la soupe passe. Enfin une chaise se libère ! Pour moi celle-là ! Je recommence à trembler des mains comme un parkinsonien, ou comme après un ultra fini... sauf que là je n’ai pas encore fini ! Une jeune bénévole se rend compte de mon état. Elle me demande si ça va, si j’ai besoin de me réchauffer, de dormir. Je la remercie pour son attention et sa compassion. Je dois continuer et être en activité si je ne veux pas sombrer dans le sommeil et « la descente » après la décharge d’endomorphine de l’effort. Je me rappelle à X-alpine (Verbier-Suisse) en 2019, à 20km de l’arrivée, un samaritain (infirmier) voulait m’arrêter parce qu’il me trouvait mal au point...Pas question d’abandonner, évidement.
Trois km pour atteindre le sentier scout (1h à la frontale), ne sachant pas où je vais ! je n’ai rien compris aux explications d’un réunionnais. Je compte les kilomètres, j’attends le passage des 100 km sur ma montre Garmin. La montre est toujours active et compte les km et le D+. On a fait la moitié au moins, il reste donc encore 24h (voir plus...) et dans mon esprit il ne reste que des petites bosses...
SENTIER SCOUT : Vendredi 20 Octobre 23h34 : 95Km 5789D+
Maintenant il va falloir avaler 13,5km interminables, j’ai la vue qui baisse et des débuts d’hallucinations. Je comprends vite qu’il va falloir que je m’arrête dormir un peu... je ne sais pas comment car je n’ai jamais testé les micro-siestes de 2-3minutes (sauf devant la télé le soir !). Je trouve partout des coureurs allongés sous leur couverture de survie, à tenter de grappiller quelques minutes de sommeil/repos.
Au début je me demandais ce que c’était ces bruits inhabituels dans la nuit : dépliage, repliage, ajustage de la couverture... un vrai hôtel à ciel ouvert... A chaque fois que je repère une petite chambrette douillette, la place est prise ! Le chemin est plus ou moins large mais il faut surtout trouver un endroit plat. J’en trouve un et je m’allonge avec le sac resté dans le dos... grave erreur : la gourde de secours pleine d’Isostar se met à fuir, je m’en rends compte quand je redémarre 3mn plus tard. Mon sac est trempé mais avec le cagnard qu’on aura au réveil, ça va vite sécher. En attendant ce n’est pas très agréable !
Comment j’arrive à faire des pauses ? Pas trop compris, la fatigue aidant, je m’endors très rapidement et me mets à rêver : c’est extraordinaire comme sensation ! Tellement fatigué que la tête disjoncte de suite. Le bruit d’un traileur vient écourter la pause et je repars pour ne pas prendre froid. Je l’ai fait 4 ou 5 fois et ça fait énormément de bien... pendant 10 mn, on a l’impression d’être à nouveau opérationnel au top de sa forme ! mais que pendant 10 mn malheureusement !
Ces micro siestes sont une expérience nouvelle, mais indispensable dans ce genre de courses beaucoup plus dures que l’UTMB.
Pour moi, ça a payé et j’avance doucement dans la nuit ; l’avantage de la nuit est qu’on ne voit pas ce qu’on doit grimper, sinon je pense que ça m’aurait sapé le moral. Je me retrouve parfois seul avec ma frontale, aucun coureur autour de moi. Eh les gars, vous êtes où ?
Je dépasse des morts-vivants au bord du chemin, de nombreuses boules de couverture de survie... impressionnant le nombre de personnes qui dorment.
Certains se targuent tout fort d’avoir fait une pause de 30mn. Ils ont de la chance de pouvoir le faire ; je pense que j’aurais du mal à repartir après un repos comme cela...
ILET à BOURSE : Samedi 21 Octobre 02h34 : 102,9Km 6127D+
Il est 2h34 du matin, je sors enfin de ce sentier scout et j’arrive sur un point de contrôle. Pas trop de souvenirs de ce lieu-dit, les charmes de la fatigue mêlée à la nuit...
GD PLACE LES BAS / ECOLE : Samedi 21 Octobre 03h46 : 106,2Km 6250D+
Je cherche désespérément une place pour m’allonger devant le Ravito. La pelouse est déjà occupée par de nombreux coureurs. Je ne sais pas comment ils font pour dormir avec le bruit ! J’essaye de boire et de prendre quelques TUC. Mais à 3h46 du matin, j’ai plus sommeil que faim. Je rebrousse chemin près des tentes et des sacs étanches où les coureurs peuvent se glisser à l’abri du froid. Là aussi c’est plein et je ne veux pas rentrer dans les tentes pour dormir 30 minutes comme proposé par les organisateurs.
Je décide d’utiliser un lit de Camp dehors et d’essayer de dormir 10 mn. La toile est humide, tout est mouillé, même moi ; je risque de prendre froid. Ça me fait du bien mais il faut repartir.
C’est la dernière journée en montagne dans ce Raid : il faut en profiter. Je suis crevé, épuisé, fatigué, exténué, je ne veux qu’une chose : dormir, dormir, dormir, mais bizarrement, j’arrive quand même à me dire que je vais découvrir des beaux paysages au lever de soleil ! Youpi !
Direction Roche Plate. Un réunionnais m’a dit que c’était un gros morceau pour sortir de Mafate, ça remplace la sortie par le Maïdo (Sentier impraticable aujourd’hui).
ROCHE PLATE : Samedi 21 Octobre 07h50 : 114,2Km 7324D+
Finalement, de ces 10 km, 1000D+, 4h de montée à la frontale avec le lever de soleil, je n’en garde malheureusement pas beaucoup de souvenir, juste l’arrivée sur le plateau avec un gros ravito ; nous rejoignons les coureurs de la course Bourbon (démarrée à 20h de Cilaos, tee-shirts bleus, pour ne pas nous confondre). Je m’assoie au fond du ravito et je constate qu’il y a un dortoir à l’ombre. Il est presque 8h du matin, une personne de l’Organisation nous incite bien à propos à mettre de la crème solaire : bonne idée.
Je reconnais Charly qui passe devant moi et nous sommes contents d’etre arrivés tous les deux ici sans blessures. Il a dormi 30mn quelque part. Je ne savais pas où il était dans la course car je ne voulais pas regarder sur l’appli de suivi. C’est bien qu’il soit là comme moi. Je le laisse, direction le chemin commun avec les bourbons. C’est étroit et pierreux. Des murailles volcaniques autour de nous nous encerclent. Un traileur m’a fait peur en me disant que nous devions monter tout en haut de la paroi verticale du Maïdo... en fait on est resté sous la crète, ouf !
Un hélicoptère se pose à coté de nous en faisant énormément de poussière. Avec un reunionnais, nous pensions qu’il nous filmait ; mais non, il est venu chercher 3 personnes de l’organisation.
Il faut passer encore une bosse pour pouvoir descendre sur Deux bras. La chaleur commence à arriver et le soleil tape. Il y a du monde sur ce chemin et tous nous encouragent. Ca fait plaisir. Le soleil réveille nos sens et notre mental. C’est dingue, 2 nuits blanches et me voilà reboosté avec le levée du jour. Une vraie fleur ! Une magnifique crète protégée par des filins nous dévoile la vallée et la mer au loin. Le paysage est en effet magnifique !
ILET DES ORANGERS : Samedi 21 Octobre 9h55 : 119,6Km 7663D+
Petit hameau où on est pointé. Je bois comme un chameau à un robinet à disposition : toujours faire le plein et se désaltérer quand on peut ! On ne sait pas ce qui nous attends en ce début de matinée déjà très chaude !
Je me dirige vers le gros ravito « Deux Bras ». J’atteints la vallée rapidement avec des torrents à traverser : c’est rigolo.
Le premier passage nécessite de retirer chaussures et chaussettes. Je décide comme certains de passer sans me déchausser. Le ravito est à 20 mn, je pense et j’ai des nouvelles chaussettes sèches qui m’attendent dans le sac de délestage.
Bon, mauvaise idée à postériori de traverser en chaussures : il fait chaud et humide et mes pieds vont macérer...
PASSERELLE d’OUSSY : Samedi 21 Octobre 12H03 : 125,5Km 8007D+
Nous passons plusieurs torrents équipés de passage de pierres disposés tous les mètres dans l’eau. On doit sautiller de pierre en pierre ; facile quand on n’est pas fatigué, mais beaucoup plus périlleux quand on a déjà plus de 100 km au compteur !
Il me reste ½ litre d’eau avant le prochain Ravito, aï ! Cette passerelle est impressionnante et au-dessus se trouve un point de contrôle mais pas d’eau disponible ! re aï ! Ce n’est qu’à 3km mais ça fait quand même 1 heure en pleine chaleur pour rejoindre cette pause méritée.
DEUX BRAS : Samedi 21 Octobre 12h59 : 128,6Km 8124D+
Sur le long chemin interminable jusqu’au Ravito, nous sommes tous en mode économie d’énergie, malgré cela nous arrivons encore à tailler la discute entre nous. On sait que les grosses difficultés sont derrière nous. Je suis largement dans les temps.
Le Ravito est immense. Il faut dire qu’on retrouve aussi le trail Bourbon, nous sommes donc nombreux. Je me trouve un lit de camp sous une tente à l’abris du soleil. J’ai récupéré mon sac et je change de tee-shirt technique. Je m’occupe à nouveau de mes pieds. Ce que je découvre en enlevant les chaussettes n’est pas très beau à voir : la peau est toute flétrie et blanche ! Beurk ! ça m’apprendra à traverser les rivières sans déchausser ! Je sèche tout ça, je talque. Ah quelle patate : le talc est resté dans le sac de Cilaos ! Du coup, je n’ai que ma crème anti-frottements. Je passe cette crème méticuleusement partout et espère que ça passera pour les 40km restants. La chaussette passe toute seul quand je l’enfile, c’est drôle. Par contre les chaussures Hoka sont encore humides... on va faire avec, je n’ai pas de chaussure de rechange.
Pour cette dernière étape, je prends soin de mettre dans mon sac le débardeur obligatoire Grand Raid à enfiler pour l’arrivée !
J’arrive à manger un vrai repas avec une saucisse et des pates ! Youloulou ! Qui aurait dit qu’une saucisse aurait pu me booster autant ! Je ne sais pas ce qui m’attends mais j’estime encore que je peux arriver vers 20h…si j’avais su !
Je prends une dernière photo du cirque derrière moi puis direction la mer ; mais avant, il y a « Dos d’Âne ». C’est un chemin cassant avec d’énormes marches à escalader, je perds l’équilibre 2 fois. Je rattrape même un concurrent qui allait basculer dans le fossé. Il faut très chaud et la moindre bise est la bienvenue.
DOS D’ANE : Samedi 21 Octobre 15h59 : 133,8Km 8972D+
À 3km de la fin de la montée, Thomas est venu à ma rencontre. Et devinez ce qu’il m’apporte ? Un COCA !!! Quel délice ce Coca frais ! Auparavant, il en avait donné un peu à un traileur à moitié mort d’hypoglycémie dans le chemin, quel brave ce Thomas ! Il nous a fait un bien fou ! (Thomas mais aussi le Coca)
Thomas m’informe que le Ravito n’est plus très loin, sauf que tous les 500 m il me dit qu’il reste 1 km… je ne comprends plus rien, j’ai hâte de voir ma femme, Gaëlle et Robin.
Enfin le « ravito famille » ! et il y a même des bonbons et des Yops ! Quel bonheur ! Je reprends des forces, ou tout du moins j’ai l’impression. Robin est ravi de me voir et Gaëlle a mis la musique de mes 50 ans. Je suis assis comme un pacha sur un fauteuil pliable. Je réclame un coca frais mais nous n’en avons pas... Heureusement la voisine qui attend aussi son poulain m’en donne un ! Quelle solidarité entre accompagnants et coureurs ! Anne dit ‘il est à moi celui-là... à moi ! (le traileur, pas le coca !)» je suis très content de l’entendre et je suis fier d’avoir une femme comme la mienne.
Pour mon bien-être et surtout pour mes accompagnants, Anne m’asperge de parfum dans le cou. J’ai l’impression d’être propre !
Quand je me regarderai quelques jours plus tard sur la vidéo prise pendant la course, j’aurai l’impression de ressembler à mon père en fin de vie... tellement maigre et émacié, ça fait peur rétrospectivement...
Il faut repartir, la première partie jusqu’au « chemin Ratinaud » est roulante sur une route béton (très répandu à la Réunion)
CHEMIN RATINAUD : Samedi 21 Octobre 16h41 : 137,1Km 8996D+
Après un dernier Coca sur ce Ravito...
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On entame un chemin chaotique qu’il est impossible de descendre même en marchant. On s’accroche aux arbres, aux lianes et parfois je me mets assis pour descendre sans me ratatiner. Thomas m’accompagne encore et c’est vraiment un beau partage, une belle complicité entre le beau-père et le gendre. Parfois il essaie de me faire parler mais il comprendra vite que je suis incapable de réfléchir donc de lui répondre, alors il me fera la conversation sans se rendre compte tout le bien que ça m’a fait de l’entendre.
Je me demande si l’organisation ne veut pas éliminer le plus possible de coureurs vu la difficulté des chemins ! C’est délicat de ne pas se blesser dans ce pierrier... Si le chemin est identique jusqu’à la possession, je vais me faire choper par la barrière horaire !!!
Je commence à comprendre que ça va m’être difficile d’arriver avant minuit. Dommage, j’aurais aimé être accueilli par Ludovic COLLET, le speaker des grands trails (notamment l’UTMB). Lors du trail des aiguilles Rouges en septembre dernier, je lui avais donné rendez-vous à la Redoute. Mais il n’est présent que jusqu’à minuit. Zut !
LA POSSESSION : Samedi 21 Octobre 18h59 : 145,5Km 9170D+
Thomas, qui n’a jamais fait de trail de sa vie, est toujours avec moi, c’est bien appréciable de partager un moment comme cela avec lui. Il constate que son beau-père, après 140 km arrive encore à courir un peu et à franchir des zones très difficiles. On arrive presque dans la pénombre au ravito, en longeant une route bitumée. Thomas connait mais moi pas du tout et j’attends avec impatience la pause. Juste avant d’arriver, je suis obligé de mettre la frontale ; en 5 minutes, la nuit est tombée. Une petite ravine et on arrive sur le ravito où mon fan-club est là.
Gaëlle va me chercher des yaourts à boire, tellement faciles à avaler et à digérer et tellement utiles pour prendre des forces. Le seul facteur limitant est le système nerveux qui est saturé : impossible de faire le moindre effort intellectuel, je pense que je ne sais même plus faire une simple addition ! Je m’efforce de me concentrer sur une chose à la fois, je reste mono-tâche, comme beaucoup d’hommes en fait !
Je suis satisfait d’être arrivé à ce point sans blessure et en relativement bon état malgré 2 nuits blanches. Même si ma prévision était d’arriver vers 19h-23h à Saint-Denis, je profite de la famille à travers le grillage de cette école. Ils ont été présents de nombreuses fois et heureusement qu’ils sont là encore. Je ne sais pas comment font les coureurs seuls et sans ce soutien moral.
Je prends conscience, même si mon cerveau est un peu déconnecté, que depuis le début et même au fond d’une forêt obscure, il y a toujours quelqu’un pour vous sourire, vous applaudir, dire votre prénom écrit sur le dossard. Cet incroyable public réunionnais salue chaque coureur comme s’il était le vainqueur. Cette émotion vous étreint pendant toute la course.
Pour les derniers 20 kilomètres, va falloir jouer avec les pavés et avancer en regardant le chrono ; j’avais calculé qu’il fallait 9 km pour aller à Colorado ; les portions de 100 me semblent faire 1 km. Thomas est toujours avec moi et me parle ; mais je n’arrive pas à lui répondre ; je me concentre sur mes pieds et surtout sur ses pieds et sa silhouette, ça me permet de ne pas réfléchir à l’endroit où je pose mes pieds, ce qui est très appréciable.
GRANDE CHALOUPE : Samedi 21 Octobre 21h21 : 152,9Km 9479D+
On est monté tellement doucement sur ces pavés, on a changé tellement de direction que j’en ai perdu le sens de l’orientation. Je pensais faire 5 km à plat et c’est de la montée et des ravines au programme. En arrivant à Grande Chaloupe, je découvre des rails et une ancienne locomotive. Je me crois en altitude. Tout me parait calme alors qu’on est près de la voie rapide. Je suis complètement paumé. J’inverse tous les repères ; j’attaque la dernière montée par le chemin anglais. Je ne me rendrai vraiment compte des lieux que quand j’y repasserai quelques jours plus tard, en balade avec ma femme.
Photo du chemin Anglais de jour, j’y suis passé de nuit, concentré à ne marcher que sur les pierres du milieu. Ça aurait été terrible de faire ce chemin en pleine chaleur. Puis on revient au bord de la mer... 300m d’altitude mais il faut encore chaud.
Je me fais un petit jus d’orange pressé, je m’étonne même à dévorer des oranges, moi qui aie horreur de ça, en quête de vitamines pour la dernière étape tant attendue, le SAINT GRAAL !
J’entame avec Thomas une première partie de la montée, il m’informe que c’est vers le lieu-dit « La montagne » que l’on va passer. C’est une zone résidentielle où habitent beaucoup de médecins du CHU. Il y a du bruit, de la musique au loin et je suis persuadé que c’est le dernier Ravito. C’est juste une fête entre amis...
Il est 23h30, Thomas me laisse sur le dernier croisement de route, il est récupéré par Gaëlle, Anne et Robin. Il est de garde au CHU demain matin en tant que réanimateur et il doit être opérationnel. Ce fut un grand moment de partage et d’échanges, même si je n’ai pas dû être très prolixe.
J’emprunte maintenant une route puis un chemin qui ressemble à un lit de rivière creusé. J’ai l’impression d’y être déjà venu...
Je m’accroche à un couple qui est devant moi puis les laisse : ma batterie de téléphone est à plat et émet toutes les 15 sec un bip qui devient très vite horripilant pour moi et mon entourage !
Colorado est une antenne haute avec une lumière rouge à son sommet. Je crois un moment qu’il va falloir grimper jusqu’à la lumière. Quel soulagement quand je comprends qu’on ne nous fera pas escalader l’antenne… ! J’arrive par une route plate (il n’y en aura pas eu beaucoup des routes plates !) au dernier Ravito où les bénévoles nous encouragent et nous félicitent. Il me reste 6 km à faire en descente et nous sommes dimanche minuit.
LE COLORADO : Dimanche 22 Octobre 00h28 : 161,9Km 10316D+
Même la dernière descente est éprouvante, tellement de cailloux à enjamber, de racines... dès que l’on peut accélérer (du moins on pense accélérer) on est stoppé par un mur de cailloux ou de pierres à franchir. Je croise un coureur qui me dit qu’il monte depuis 45 mn. Rapide calcul dans ma tête épuisée : il va me falloir 30 mn pour descendre...
Il est 00h53 et un dernier jeu m’occupe :ne pas s’arrêter tant que je n’ai pas 1h18 sur ma montre. J’ai l’impression de descendre vite, je ne me fais pas doubler et même je double. Cette S…pe de montre affiche souvent « Repos » , pensant que je suis arrêté ! C’est très vexant, mais ça me booste : j’accélère pour qu’elle n’affiche plus ce message.
Je sens des ampoules pousser à grande vitesse aux pieds : pas grave, ce n’est pas ça qui va m’empêcher de finir. La bobologie se gérera après la course. Je vais mettre 1h30 pour faire 6 km ; impressionnant ! la vitesse de l’escargot qui pense aller vite...
ST DENIS LA REDOUTE : DIMANCHE 22 Octobre 02h04 : 167,6Km 10371D+
Un réunionnais nous indique au loin le pont à traverser avant d’entrer sur le stade de la Redoute. Ça me parait loin, mais tellement prêt du but ! Je suis pressé d’arriver pour me reposer mais bizarrement j’appréhende la fin de cette aventure hors norme. Je rattrape un groupe de traileurs (des vraies tortues !). Un comble, je descends plus vite qu’eux. Je m’étonne encore de pouvoir encore, après 160 km, doubler et montrer que j’ai encore des ressources. Je suis remonté à bloc, toutes les souffrances passées sont oubliées. Les nouvelles souffrances (les ampoules aux pieds par exemple) ne sont pas enregistrées par le cerveau. J’ai mal un peu au genou droit, pas grave, je peux tenir encore 2 km. On verra plus tard. Je finirai en rampant si nécessaire !
Arrivé juste devant le pont ; je m’arrête pour enfiler LE débardeur ‘Grand Raid’, je me fais doubler par les 7-8 personnes que j’avais réussi à doubler : zut ! mais ce n’est pas grave, je préfère arriver serein, seul sur le stade. Les derniers mètres jusqu’à l’entrée du stade sont d’une facilité déconcertante. Je cours, trottine sans douleur. Je sors mon iPhone et je filme la rentrée dans le stade. Gaëlle et Anne sont là, Robin a été réveillé par sa mère pour voir son grand-père arriver sur le stade. Je passe la frontale/casquette à Anne, histoire d’être présentable pour la photo finish. Eh oui ! même après 170 km, je pense à ce petit détail ! c’est fou !
Un spectateur me dit de ne pas courir, de profiter de l’instant. Je ralentis et j’arrive en levant les bras. J’ai survécu, j’ai vaincu ce trail mythique !!!
Le speakeur m’accueille en me serrant la main. J’ai été très surpris de ce respect et de cette convivialité. Tous les coureurs sont accueillis comme cela et nul par ailleurs, on est considéré comme cela. Il me dit que « c’est un exploit extraordinaire, qu’il est plein de respects de ce qui a été fait sur l’épreuve ». J’ai dédicacé cette course aux habitants d’Arras qui ont souffert la semaine dernière lors des évènements au complexe scolaire Gambetta. J’ai remercié les bénévoles, tous solidaires, attentionnés et souriants.
Je quitte l’aire d’arrivée en récupérant mon tee-shirt finisher et la fameuse médaille, zouc : une de plus pour ma collection. Je retrouve Gaëlle, Anne et Robin (qui dort à nouveau). Il est 2h du matin.
J’ai Sophie ma sœur au téléphone qui me félicite ; j’arrive encore à échanger, à tenir des propos cohérents ; comme quoi je n’étais pas encore totalement fatigué (j’aurai pu faire mieux ?). Le cerveau et le système nerveux sont saturés mais pas les muscles en fait.
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Gaëlle récupère mon sac de délestage du Ravito « Deux Bras » qui est revenu à l’arrivée. Nous sortons du stade en marchant lentement : je ne peux pas faire mieux. La voiture n’est pas garée à coté car pas de parking prévu à cet effet, zut !
Nous rentrons vers Saint-Leu à 3h30 du matin. Je n’ai donc pas fait de 3eme nuit complète dans la montagne !
J’ai perdu 8 kg de ... je ne sais pas quoi... un bout de cerveau, de pieds, d’eau surement... Anne dit que c’est « inhumain ». J’ai dû dormir 20 minutes la deuxième nuit par période de 5mn, et je n’ai pas eu des blocage intestinal dû à l’effort trop intense. Faut dire que je mangeais essentiellement du liquide.
Ce trail mythique à l’ile de la Réunion a été clément avec moi, il m’a permis de la traverser sans trop de problème. Ma préparation devait être bonne puisque je l’ai terminé. Il fallait gérer les autres évènements, contraintes mentales et physiques. Je n’avais pas tout prévu, loin de là, mais c’est cela l’aventure ; l’inconnu est moteur de stress positif. Il faut s’adapter, se remettre en cause et écouter son corps, ne pas le bloquer pour pouvoir continuer à avancer.
22/10 - 23/10 : Repos et récupérations
Couché vers 4h, je passe une mauvaise nuit. Je bois comme un malade. Je suis comme dans une centrifugeuse de cosmonautes, tout se couche devant moi, je tombe... très bizarre de revenir à la réalité et de dire à son corps que c’est fini. Les muscles reçoivent des décharges douloureuses qui me réveillent ; je me lève à 8h du matin. Quatre heures de repos agité, c’est peu. J’ai réussi bizarrement à ne pas dormir le dimanche mais nous n’avons pas bougé de la maison.
Le lundi, nous visitons avec Anne, une cascade à Saint-Gilles et les jambes répondent bien malgré quelques appréhensions d’équilibre. Certains visiteurs arborent le tee-shirt de finisheurs , d’autres comme moi gardent seulement le bracelet jaune « Diagonale des fous 2023 ». L’occasion de nouveaux échanges sur cette expérience hors du commun.
Même ma montre m’indiquait qu’il ne fallait pas que je fasse une activité physique... (vous êtes épuisé...me dit-elle !)
Brave montre, elle est quand même gentille, elle me rajeunit de 8 ans !
Avec Anne, nous avons profité de l’Hôtel des Aigrettes (3 nuits réservées avec le dossard) et de sa piscine très chaude.
Un ami de Thomas et Gaëlle (Yohan) me propose un massage Thai par une de leur connaissance. Avant la course, je ne voulais pas en entendre parler, puis Gaelle me l’a quand même réservé en secret, ce n’était en fin de compte pas désagréable, assez spécial mais pas mal du tout ! Anne est restée les 2 heures à surveiller la jeune et sympathique masseuse, Maya : on masse mais on ne fait rien d’autre, c’est le mien !
- La prévision de l’horaire du prochain Ravito,
- Où dormir pendant la nuit.
- A la famille qui dort ou qui s’apprête à prendre la route pour Cilaos ou Possession
- A tous ceux qui vous suivent sur le LiveTrail.
- Aux personnes malades ou disparues. (Fred un cousin qui aurait voulu participer, Marie-Laure ma belle-sœur, Michel mon père)
- Aux messages
- A avancer pour ne pas décevoir.
- A tous les entraînements et sacrifices depuis plusieurs mois, même si certains étaient dans des montagnes magnifiques.
- A la déception si on doit abandonner… impossible si pas blessé et toujours dans les temps.
- A la fierté de finir et d’avoir tenu mentalement et physiquement.
- D’être dans des chemins que je ne referai sûrement jamais et qui s’ouvrent à moi.
- A mes enfants qui me prennent pour un fou mais qui me soutiennent.
- A ma femme qui me soutient, me booste et que j’aime !
- Au lendemain (Samedi) où on espère être encore en course.
- Au lendemain (dimanche) ou l’on se dit que l’aventure sera finie, avec l’espérance d’avoir été finisheur.
- A la semaine prochaine, ou se dit qu’on sera au bureau devant un écran d’ordinateur !
- Aux pointages de chrono ou de distance pour se fixer un but.
- Et puis souvent à rien car trop difficile de penser, toute l’énergie servant à commander le pas suivant.
POURQUOI s’imposer cette souffrance ?
Pour réaliser un défi que peu de personnes peuvent faire.
Rentrer dans une zone de fatigue qui déclenche des états complètement extraordinaires et uniques. Des instants de joie de pouvoir vaincre son corps, des instants de réflexion sur le but de ce trail, des instants où le cerveau cesse de stoker les images et les douleurs, mais aussi des instants d’euphorie d’être si proche de l’arrivée ce qui te donne des ailes et te permet de continuer à avancer sans douleurs.
De prouver qu’à 57 ans, on peut faire mieux que certains jeunes, que l’on peut franchir des limites. C’est sûrement par masochisme, pensent certains, mais se faire mal dans une course extrême est une discipline de la vie, avoir l’envie de se dépasser, de se confronter à la nature, à des contraintes naturelles, à son physique. Après une telle expérience voulue puis subie, on peut relativiser les souffrances et les événements de la vie. On reste zen et posé ensuite et on attire aussi le respect d’avoir réussi ce défi unique.
On le fait pour soi aussi, pour vivre, se sentir vivre passionnément des instants uniques et solitaires. On le fait aussi pour montrer aux autres que tout est possible avec son corps si on a la volonté de le contraindre, de l’apprivoiser sans trop le blesser et … donner envie à ses proches, aux jeunes de faire du sport et d’avoir des défis dans ce monde parfois trop virtuel où le plaisir doit être immédiat en payant, où l’attente d’un désir est trop souvent difficile.
Remerciements
Je remercie mes accompagnants ; Ma fille Gaëlle, mon gendre Thomas (qui m’a accompagné), mon petit-fils Robin (3 ans), ma femme Anne durant cette aventure pour le soutien logistique et mental.
Un Grand MERCI à
Mes 4 autres enfants (Luc, Louis, Alix et Paul), ma famille et belle-famille,
Tous mes amis : Laurence, Christelle, Anne, Chriss, Marie-Laure, Alexis, Bruno, Hugues, Gilles, Fabrice, Thomas, Vincent, Claude, Agnès, Marie, Valérie, Romain, Christophe,
Pour leurs messages et encouragements, qui m’ont permis de conserver la motivation d’être finisheur de ce trail mythique.
Palmarès
https://itra.run/RunnerSpace/RaceResults/BAUDET.Christian/42314
Trail/Ultra-trail/Marathon |
KM / D+ |
Nbre fois Finisheur |
Années |
169 km / 9870 m+ |
1 |
2023 |
|
167 km / 9618 m+ |
2 |
2014-2017 |
|
110 km / 8880 m+ |
1 |
2017 |
|
119 km / 7260 m+ |
1 |
2013 |
|
105 km / 6900 m+ |
1 |
2019 |
|
104 km / 7480 m+ |
1 |
2019 |
|
83 km / 5190 m+ |
6 |
2016-2017-2018-2019-2021-2023 |
|
88 km / 4672 m+ |
1 |
2012 |
|
82 km / 6330 m+ |
3 |
2014-2015-2016 |
|
74 km / 4810 m+ |
1 |
2018 |
|
73 km / 3750 m+ |
2 |
2021-2022 |
|
71 km / 1864 m+ |
1 |
2015 |
|
52 km / 4250 m+ |
8 |
2011-2012-2013-2016-2020-2021-2022-2023 |
|
42 km / 2515 m+ |
2 |
2012-2013 |
|
30 km / 2300 m+ |
2 |
2012-2016 |
|
30 km / 900 m+ |
1 |
2018 |
|
23 km / 1454 m+ |
1 |
2011 |
|
Marathon de Paris |
42,195 km |
12 |
2011-2012-2013-2014-2015-2016-2017-2018-2020-2021-2022-2023 |
Marathon de Londres |
42,195 km |
1 |
2019 |
Marathon de Nice |
42,195 km |
1 |
2010 |
Marathon Lens-Lille |
42,195 km |
1 |
2010 |
Table des matières
Le grand RAID : La Diagonale des Fous
Entrainements, courses et Trails pour progresser.
Arrivée sur l'Ile de la Réunion le 15/10/2022 8h30
Mercredi 18/10 : Retrait des dossards
La Diagonale, Heure par heure pendant 4 jours
DEPART 21h30 SAS 4: Jeudi 19 Octobre
Domaine VIDOT : Jeudi 19 Octobre : 23h23 : 15km 678D+
Notre Dame de la PAIX : Vendredi 20 Octobre 3h15 : 28km 1830D+
Parking Aire NEZ de BOEUF : Vendredi 20 Octobre 5h27 : 40,8km 2544D+
MARE A BOUE : Vendredi 20 Octobre 07h19 : 51,2km 2594D+
CROISEE KERVEGUEN : Vendredi 20 Octobre 11h19 : 63,3km 3596D+
LE BLOC : Vendredi 20 Octobre 13h06 : 67,9km 3637D+
PLATEAU DES CHENES : Vendredi 20 Octobre 13h38 : 70km 3754D+
CILAOS : Vendredi 20 Octobre 14h04 : 72,5km 3769D+
SENTIER TAIBIT : Vendredi 20 Octobre 17h01 : 79,3km 4336D+
MARLA : Vendredi 20 Octobre 22h06 : 85,5km 5174D+
PLAINE DES MERLES : Vendredi 20 Octobre 22h37 : 92,9km 5698D+
SENTIER SCOUT : Vendredi 20 Octobre 23h34 : 95Km 5789D+
ILET à BOURSE : Samedi 21 Octobre 02h34 : 102,9Km 6127D+
GD PLACE LES BAS / ECOLE : Samedi 21 Octobre 03h46 : 106,2Km 6250D+
ROCHE PLATE : Samedi 21 Octobre 07h50 : 114,2Km 7324D+
ILET DES ORANGERS : Samedi 21 Octobre 9h55 : 119,6Km 7663D+
PASSERELLE d’OUSSY : Samedi 21 Octobre 12H03 : 125,5Km 8007D+
DEUX BRAS : Samedi 21 Octobre 12h59 : 128,6Km 8124D+
DOS D’ANE : Samedi 21 Octobre 15h59 : 133,8Km 8972D+
CHEMIN RATINAUD : Samedi 21 Octobre 16h41 : 137,1Km 8996D+
LA POSSESSION : Samedi 21 Octobre 18h59 : 145,5Km 9170D+
GRANDE CHALOUPE : Samedi 21 Octobre 21h21 : 152,9Km 9479D+
LE COLORADO : Dimanche 22 Octobre 00h28 : 161,9Km 10316D+
ST DENIS LA REDOUTE : DIMANCHE 22 Octobre 02h04 : 167,6Km 10371D+
22/10 - 23/10 : Repos et récupérations
- Détails
- Catégorie : Ultra-Trails
- Clics : 1529
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